L’armement Lemoine à Saint-Malo (1793-1933)

      La famille LEMOINE ne fait pas partie des “VIRUS ILLUSTRIBUS URBIS MACLOVIENSIS” . Les LEMOINE ne sont pas des hommes à prendre de nombreux mandats politiques, à recevoir des honneurs et des médailles, à s’illustrer dans les plus grands faits de la Cité . Ils sont  en réalité plus connus pour armer de nombreux navires et négocier la morue venant de Terre-Neuve, pour entreprendre et investir, pour défendre certes leurs intérêts mais également ceux de leurs marins et au delà ceux de l’ensemble du monde de la pêche.

     Nous n’allons donc pas parler aujourd’hui  de la Grande Histoire de Saint-Malo avec des hommes célèbres, des faits d’armes ou encore des évènements politiques importants.

La science historique peut avoir, au delà des faits majeurs, une approche économique voire sociologique avec une étude presque statistique, chiffres et archives en main, du millieu portuaire, du monde de la mer, des lieux de pêche à Terre-Neuve et d’un armement en particulier avec ses hommes, c’est à dire son armateur, ses capitaines et l’ensemble de ses marins et ouvriers.

     Les Archives publiques et celles privées avec quelques documents iconographiques se complètent parfaitement. Les premières sont systématiques mais parfois sans relief, les secondes sont de temps en temps très parlantes mais aussi très décousues, sans aucune continuité.

     Avant de décrire l’entreprise d’armement par elle-même, nous allons présenter les personnages en présence.

                  I - LA FAMILLE LEMOINE AVEC CINQ GENERATIONS DE CAPITAINES ET D’ARMATEURS (1748-1933)

                      A - LES ORIGINES A AGON

            Le plus ancien que nous connaissons est Gaspard LE MOYNE, époux de Marie ADAM, tous deux décédés avant 1692. Ils habitent  Agon, un village de pêcheurs situé à l’embouchure de la Sienne dans  l’évêché de Coutances .

            Leur fils Charles y épouse Marie TANQUERAY, par contrat du 26 juin 1692. De cette union, naissent plusieurs enfants dont nous savons qu’au moins deux garçons Etienne et Denis se fixent à Saint-Malo et s’enrôlent dans la navigation; Etienne épouse à Saint-Malo en 1733 Catherine LUCE; Denis, veuf en premières noces de Anne TANQUERAY, y épouse en 1748 Suzanne BAR originaire de Saint-Servan ; ce dernier est capitaine cette même année du Providence, brigantin de 80 tonneaux,puis en 1750 du Thérèse, navire de 130 tonneaux construit à Saint-Malo, par la suite en 1764-66 du Jeannette, senau de 80 tonneaux (1).

            A la génération suivante, François et Charles LEMOINE, leur fils respectif , vont devenir capitaine de navires puis armateur . François L. est en 1770-1771 capitaine du Sainte-Roze , senau de 90 tonneaux ayant pour armateur Mesle du Grand Clos; en 1774 capitaine du Saint-Rémy, goélette de 45 tonneaux dont l’armateur est Dupuy-Fromy; ce même navire a eu pour autre capitaine un certain Charles TANQUERAY, originaire de Agon ; Charles L. , de son côté est capitaine en 1766 du Saint-Julien , brigantin de 45-50 tonneaux, en 1767 du Julien , brigantin de 45 tonneaux , de 1775 à 1778 du Pierre , senau de 45-50 tonneaux construit à Saint-Malo en 1763; en 1784,  il est armateur du Suzanne, brigantin de 60 tonneaux , le capitaine en étant François Clément GANNE de Blainville (1).

            L’ascension est très rapide pour ces hommes et Saint-Malo les attire car ils y trouvent du travail et la reconnaissance immédiate de leurs mérites. L’estuaire de la Sienne est devenu totalement ensablé; d’autre part , Granville, le port de pêche le plus proche n’offre pas les mêmes perspectives d’embauche et de réussite (2). Tout au long de ce 18ème siècle, affluent à Saint-Malo de nombreuses familles venant du Cotentin et d’ailleurs; elles se connaissent bien et sont déjà très souvent alliées; elles se retrouveront dans les mêmes équipages des navires; Les GANNE, LAROQUE, LEFRANCOIS et LELOUP viennent de Blainville sur Mer, les DUBREUIL et LEDOUX de Regnéville, les LUCE de Bretteville, les LE PELAY de la Lande Doyenne et puis les TANQUERAY et les LEMOINE de Agon.

           B - François-Etienne LEMOINE, fils de François L et de Anne-Marie GAUTIER nait à Saint-Malo le 11 janvier 1770. Accédant très rapidement aux fonctions de négociant et d’armateur, il épouse à Paimpol le 12 février 1798 -an VI- Marie-Josèphe BECOT. Le ménage habite en 1799 -an VII - à Saint-Malo dans la rue de l’ancienne Boulangerie. A cette époque, la France était en guerre avec l’Angleterre et Saint Malo participait  depuis 1793 à une quatrième guerre corsaire . Les navires  Terre-Neuviers   s’adaptent  au combat et s’équipent  de fusils ainsi que de plusieurs canons, parfois d’obusiers ou encore de pierriers. Il s’agit de brigantins, lougres, amyggleres ou cutters,  ayant de faibles tonnages pour avoir une plus grande mobilité.

            Depuis 1793 jusqu’en 1800 - an X -  François-Etienne LEMOINE arme Le Custines, l’Auguste, l’Imprenable, l’Entreprise, la Surprise, l’Audacieux, la Delphine.  Plusieurs navires anglais sont pris: le Thomas et Nancy, l’Apollon, la Caroline, l’Actif, le Balcaras. Un navire américain , le Hope, est également appréhendé mais en vertu du Droit des Neutres, la prise est jugée mauvaise. Pendant cette période troublée de la Révolution, François LEMOINE est “désarmé pour s’être dans plusieurs occasions montré un caractère turbulent opposé au bon ordre et à la tranquilité publique; pour s’être le 28 frimaire an III permis de traiter de mesure fédéraliste un arrêté du représentant Boursault concernant l’organistation des gardes territoriales et avoir manifesté son attachement au système de la Terreur” !!! (3).  L’entreprise va être de toute façon interrompue par le décès sans doute accidentel de l’armateur survenu à Brest le 3 germinal an VIII, à l’âge de 30 ans.

           C - Le jeune François Guillaume LEMOINE n’a qu’un an au décès de son père; malgré tout, dès l’âge de 26 ans, il se lance lui aussi dans le Grand Métier; dès 1825- 1826, il achète, avec l’aide financière de sa mère et de quelques associés comme Charles CUNAT, Louis BLAIZE ou encore un BECOT, en parenté avec lui par sa mère, plusieurs petits navires usagés: le Jeune Emmanuel, sloop de 48 tonneaux, le Jeune Frédéric, dogre de 47 tonneaux, le Messager, sloop de 29 tonneaux, la Jeune Adèle, brick de 160 tonneaux , le Diligent, dogre de 60 tonneaux. Puis vient un grand trois-mâts, la Noémie, de 336 tonneaux en association pour 51/128ème. En 1828, il se fait construire sa première goélette neuve, un petit bâtiment de 59 tonneaux, dénommé Le Trimballeur. Elle se consacre au petit cabotage; le maître d’équipage est Hippolyte Victor Jean BECOT. Par la suite, les navires vont être plus nombreux et plus gros; les destinations et les usages sont variables: le petit cabotage entre les ports français ou avec l’Angleterre, le grand cabotage avec les ports de toute l’Europe, le long courrier avec la Martinique ou avec l’île Bourbon (la Réunion), enfin Terre-Neuve  pour la pêche .

            La pêche à la morue sèche constitue l’activité essentielle de l’armement; elle a lieu  au filet  ou “hallope” puis à la ligne soit errante soit plutôt dormante , à partir d’une chaloupe et après 1875 au doris dans les havres de la côte Ouest de Terre-Neuve, le FRENCH-SHORE; le poisson est préparé ou “habillé” à terre sur des pontons appelés  chauffauds; il est séché sur les graves de Terre-Neuve ou de Saint-Pierre et Miquelon, cette île ayant été restituée à la France en 1814 par le traité de Paris.

            Nous avons pu retrouver la mention de François LEMOINE à trois endroits précis (4):

            - Sa maison d’armement fait deux demandes de concession de graves, l’une en 1854, l’autre en 1858 , toutes les deux pour l’île aux Chiens (IIe aux marins depuis 1931)

            - Une tempête fait rage sur les côtes de Saint Malo du 28 février au 2 mars 1869; les navires GLANEUR, MOGADOR , tous deux de l’armement LEMOINE, ainsi que JULIEN , amarés en rade durent fuir sur leurs ancres. Ils sont sauvés par le FAON et le DUGUAY-TROUIN qui les conduisent à Solidor.

            - Enfin François LEMOINE est semble-t-il membre du conseil municipal de Saint-Malo dans les années 1870.

           Dès qu’il lui est possible, il initie ses trois garçons Francis, Auguste et Anatole au métier de l’armement. Un même jour de décembre 1871, il achète à Granville quatre navires provenant sans doute d’une liquidation: le Puget, trois-mâts de 235 tonneaux, le Nive, brig de 215 tonneaux, l’Amélie, brig de 150 tonneaux et l’Adour, brig de 156 tonneaux. L’année suivante, Francis LEMOINE, l’aîné, décède prématurément à Bel Air en Saint-Servan ; il était vice-consul d’Espagne à Saint-Malo. De sorte qu’au décès de François LEMOINE survenu à Saint-Malo rue d’Asfeld le 23 janvier 1885, l’armement est partagé entre Auguste et Anatole, ses deux autres fils . Le journal “Le Vieux Corsaire” du 30 janvier nous donne une notice nécrologique intéressante en détails et en appréciations.

           François LEMOINE avait épousé à Saint-Servan le 11 septembre 1832 Augustine Marie MORAS, fille de Jean Louis MORAS médecin militaire , maire de Saint-Servan en 1799-1800 et de Marie Françoise ROUAULT de COLIGNY. Ce mariage donnait au jeune armateur des parentés et alliances avec de nombreuses autres maisons maritimes, les ROUAULT de COLIGNY, les BODINIER, les GUIBERT, les DUBOIS des CORBIERES . Au décès de Marie Françoise MORAS en 1845, la maison de Bélair qu’elle possédait à Saint-Servan et qui provenait de la famille BODINIER est attribuée à sa fille Augustine Marie LEMOINE; le couple LEMOINE vient alors y habiter. Cette demeure reviendra en 1885 après le décès de François LEMOINE et de sa femme à Alice LEMOINE leur seule fille qui restée célibataire était Chanoinesse du Pape. Ses deux frères , dans le même partage, se séparent l’armement de leur père et ils poursuivent le métier de la pêche à Terre-Neuve malgré les difficultés du moment, avec la question de la boëtte et celle des homarderies.

           D - Anatole LEMOINE, armateur et Vice-Consul d’Espagne, décède à son tour prématurément à l’Artimon en Saint-Servan le 9 novembre 1889, à l’âge de 46 ans. Il avait épousé à Laval le 21 novembre 1877 Berthe DUBOIS, une fille et soeur de notaires. Les deux enfants du ménage, Berthe et Henri, ont respectivement 6 et 4 ans. Une décision est prise immédiatement. Par délibération du 22 novembre 1889, le conseil de famille composé de Auguste LEMOINE, James O’RORKE, Philippe LANCE, Henri DUBOIS, Pierre MARIE-ROUSSELIERE et Charles ROUXIN décide l’acceptation pure et simple de la succession et l’autorisation de liquider amiablement la maison de commerce avec Joseph BLAIZE comme conseiller liquidateur.

           Les comptes de liquidation, en grande partie conservés, vont constituer à cet instant donné une source d’informations non négligeable. Les comptoirs et les navires sont inventoriés ; les marins sont réglés par mandats de leur campagne de pêche de  1889; les navires et matériels sont vendus à l’amiable, les dettes réglées, les créances encaissées . Une vente publique a lieu pour le matériel de pêche pendant cinq jours consécutifs du 22 au 26 juillet 1890 inclus. Dans une situation au 30 octobre 1890, le boni de liquidation  ressort à 383 115,50 francs. Il est à noter que Joseph BLAIZE décède le 11 février 1891 sans avoir pu terminer lui-même cette liquidation qui s’acheva en réalité le 15 juin 1891.

         Suivant acte reçu par Me Turquet, notaire à Laval le 15 mars 1893, Berthe LEMOINE reçoit en partage des biens de ses parents décédés précédemment en 1887 et 1892,  la propriété  de l’Artimon située à Saint Servan rue Jeanne Jugan. Elle s’y installe définitivement avec ses deux enfants et y effectue un agrandissement important, financé au moyen des fonds provenant de la liquidation. L’immeuble situé à Saint Malo 5 rue d’Asfeld est vendu par adjudication en 1904 à la Banque de France.

          Dès la fondation de la Société des Oeuvres de Mer en 1895, Berthe LEMOINE figure parmi les bienfaiteurs pour “d’importants services rendus aux Oeuvres”; elle sera de 1896 à 1926 la présidente du Comité des dames de Saint-Malo-Saint-Servan, ce comité ayant pour rôle de collecter les fonds nécessaires à l’association.

          E - Auguste LEMOINE poursuit de son côté ses activités de commerce et de pêche en pratiquant  le long courrier et la pêche à Terre-Neuve . En 1891, il est noté avoir pêché avec 14 hommes et 1 600 casiers un total de 123 000 homards conservés en 640 caisses de 48 boites, chacune de 600 grammes. En 1865, Auguste L. avait épousé Clémentine HOVIUS, la fille de Ludovic dit Louis HOVIUS armateur lui même et président  du tribunal de commerce, et dont il eut trois enfants Francine, Auguste et Ludovic. Au décès de son beau-père en 1894, il s’installe dans la malouinière de La Ballue à Saint-Servan.

          F - Ludovic LEMOINE succède à son père décédé en 1903. Toutefois, la pêche a beaucoup évolué. La France abandonne en 1904 la pêche à la côte de Terre-Neuve. Malgré la propulsion à la vapeur et l’innovation de la pêche au chalut, Ludovic ainsi que la plupart des marins malouins reste, sans doute à tort, attaché aux navires à voiles et à la pêche aux doris . Lors du conflit mondial de 1914-1918 , de nombreux navires de pêche vont être anéantis dont le Notre Dame de la Garde, brig de 133 tonneaux, La Tour d’Auvergne, brig de 178 tonneaux, le Florentine, goelette de 126 tonneaux . Il ne subsiste après cette période que deux navires:

          - Le Eider, trois-mâts goelette de 177 tonneaux bruts construit en 1910 aux chantiers Gautier de Saint Malo; appartenant à Clémentine LEMOINE, il est vendu en 1917 à son fils Ludovic et est attaché à partir de 1919 à Saint-Pierre et Miquelon.

          - L’Ermite, trois mâts de 335 tonneaux bruts , construit à Saint Malo en 1924 avec les dimensions suivantes: longueur 39,47 m, largeur 8,8m, hauteur 4,05m, appartenant à Ludovic LEMOINE, 2 rue d’Orléans à Saint Malo, pour 7/45ème; ce navire coulera par voie d’eau le 13 août 1933 à 13 milles environ de Holstenborg, au Groenland; sur les 34 personnes à bord, un marin Louis Pinault de Plerguer disparaitra dans les flots . Avec ce dernier navire, disparait également l’armement LEMOINE . La même année, Ludovic L. vend par nécessité sa propriété de la Ballue.

         Voici brossées les cinq générations de capitaine et armateurs installés depuis 1733 à Saint Malo. Essayons désormais d’analyser l’entreprise d’armement au travers notamment des documents dont nous disposons.

      II - L’ENTREPRISE D’ARMEMENT ET LES COMPTES DE LIQUIDATION.

            A - Pour l’analyse, nous bénéficions des archives de l’inscription maritime avec les registres des bâtiments, les rôles des équipages, les registres d’armement et de désarmement. Ces archives couvrent bien sûr toute la période concernée avec des renseignements très précieux sur la vie des navires et sur celle des hommes. Malgré la qualité exceptionnelle de ces documents de recherche, nous émettons deux observations: tout d’abord le nom de l’armateur y est indiqué sans mention de son prénom ce qui pour nous aurait été bien préférable; ensuite, il n’existe qu’un index alphabétique des noms des navires; lorsque vous ne possédez qu’une liste incertaine et à coup sûr incomplète des navires, il n’y alors pas d’autre solution que le feuille à feuille ...

            Les archives notariales nous fournissent également de précieux renseignements avec les contrats de mariage, les achats ou les reventes immobilières, surtout avec les réglements de succession, comprenant notamment des testaments, des inventaires et très souvent des partages. L’analyse d’un acte de partage reçu par Me Fourmond notaire à Saint Malo le 5 octobre 1885, suite au décès de François LEMOINE nous apporte des éléments sur la description des biens professionnels, les immeubles, les matériels d’armement et les navires, leur évaluation et leur sort avec des attributions soit à Auguste soit à Anatole LEMOINE - ici avec les prénoms .                                                                                                     L’année du décès de Anatole Lemoine en 1889, nous bénéficions de quelques archives privées supplémentaires avec essentiellement les comptes de la liquidation amiable de l’armement; nous devons très certainement cette préservation de documents, alors que tous les autres comptes de toutes les autres années ont disparu, au fait que sa veuve en était responsable vis à vis de ses enfants pendant toute leur minorité. Outre ces comptes au sens strict, nous bénéficions aussi de données supplémentaires avec des résultats de pêche, des commandes de matériel, des bons de livraison, quelques correspondances, des comptes de marchandises, des devis, des mandats aux marins, des certificats de travail, une concession temporaire de l’ancienne grève du Talard, une convention de transport de passagers, un code télégraphique, des inventaires sur les navires ou dans les comptoirs à Terre-Neuve, des listes de matériel, de poulies, etc ...                                                                                                                     B - Les instructions de pêche données par l’armateur aux capitaines.

            Anatole LEMOINE, en début de campagne de pêche, envoie les 23 et 25 mars 1889 trois instructions; deux sont nominatives: l’une pour Monsieur Landgreen, capitaine du brick QUI QU’EN GROGNE; l’autre pour Monsieur Mary, capitaine de la goelette ELISABETH; la dernière enfin est destinée d’une façon plus générale à la pêche à l’Anse: il s’agit de l’Anse Barée située dans le Golfe du Saint-Laurent. Ces documents énumèrent l’ensemble des préoccupations que peut avoir un armateur alors qu’il est si loin de son navire et des lieux de pêche et qu’il a confié l’ensemble de ses intérêts à un capitaine et à son équipage. Il y est évoqué successivement : la route à prendre - le lieux de pêche à utiliser avec parfois l’improvisation nécessaire ou l’alternative selon la réussite de la pêche - la préparation des homards - bien suivre la recette, surveiller la cuisson et la mise en boîte - soit à la saumure sans joint de soudure, soit à l’anglaise avec le joint de soudure - boîtes bien remplies sans vide - pas trop de saumure et les beaux morceaux sur le dessus !! - homards frais et non morts - mise en boîte non chaud et donc bien refroidi - grande propreté indispensable - la préparation de la saumure, bien claire - le marquage des caisses selon une codification bien établie - la coordination avec les autres navires de l’armement, l’entraide en personnel et en matériel ou en approvisionnement - la livraison des morues pêchées - le séchage du petit poisson - la manière de se procurer les boëttes, de les acheter - l’organisation matérielle à bord - la surveillance des hommes, surtout des mousses, et des postes de travail - la manière de se tenir au courant par télégraphe - les informations codées sur les résultats de pêche - l’approvisionnement en matériel - les relations, les attitudes à adopter avec la Station (tout par écrit et non verbalement) - le rappel de la manière dont le bateau est assuré avec le montant assuré, l’estimation donnée et l’assurance pour le voyage avec ou sans escale, l’assurance de l’armement, l’assurance du corps du bateau, l’exclusion des cas d’abordage, échouement et incendie - on y parle aussi de la signature des certificats de chargements - l’installation sur la côte et la remise en état des cabanes pour l’habitation et pour la préparation du homard avec les charpentiers, les soudeurs - la réaction face aux glaces - enfin l’approvisionnement en sel, en bois, en charbon ...

             Ces instructions sont très énumératives mais elles nous permettent de bien comprendre le rôle de chacun ; elles nous laissent presque en situation de vécu ; une observation est à faire cependant : on ne parle nulle part ici du subrécargue, le capitaine de pêche aux ordres directes de l’armateur, par opposition au capitaine-porteur ou pilote, seul responsable du navire depuis le port d’attache jusqu’à l’arrivée sur les lieux de pêche: ici donc semble-t-il un seul poste pour ces deux fonctions, un seul capitaine, contrairement à ce qui a pu se pratiquer ailleurs.

            C - La défense des lieux de pêche constitue un autre élément intéressant de notre dossier d’archives privées. A cette époque, les pêcheurs français étaient en conflit avec leurs homologues anglais sur deux points particuliers, appelés guerre pour les uns et question pour les autres, plus prosaïques.

             La recherche de la boëtte, c’est à dire des appâts, a toujours été un souci majeur pour les pêcheurs à Terre-Neuve. Ils utilisent souvent le hareng emporté salé ou glacé en première pêche; par la suite, en seconde pêche il faut s’approvisionner soi-même en capelans ou en encornets; la plupart du temps , l’appât est acheté aux pêcheurs locaux; or une loi de 1885 de l’institution Terre-Neuvienne, le BAIT-BILL, interdit désormais à ses ressortissants la vente des appâts. Les Français sont tout spécialement visés par cette mesure qui était en réalité d’inspiration anglaise. Il y a donc pendant toutes ces périodes une grande difficulté d’approvisionnement;  les pêcheurs locaux en impossibilité de vendre sont dans une situation tout aussi préjudiciable; en 1890, les Fécampois innovent avec le bulot, appelé aussi coucou; malgré quelques réticences (5), ce nouvel appât sera une réussite.

             Pendant ce même temps (1886-1890), il y eût aussi ce que l’on a appelé la “guerre du homard”. Les LEMOINE qui péchaient beaucoup à la Côte et avaient une forte production de homards en conserve, ont été en prise directe dans ce conflit. Les pêcheurs français avaient pour eux trois arguments: 1°) les Anglais dont un certain Shearer, ont construit et exploité sur la zone française dix usines à homards, dont sept nouvelles; 2°) les pêcheurs anglais utilisent de grands filets dits “trappes à morues” lesquels sont interdits aux pêcheurs français; 3°) Les goélettes nomades en allant  sur les côtes du Labrador, défilent le long du French-Shore et pêchent ce qui leur est interdit.

             Les anglais émettent par leur diplomatie les réclamations suivantes: 1°) Les primes accordées par le gouvernement français a pour effet d’abaisser le prix du poisson à l’exportation, au détriment donc des autres pays producteurs; 2°) La thèse de la pêche concurrente est possible en faveur des insulaires pour ce qui est de la morue et en faveur de tous pour toutes les pêches autre que le poisson. 3°) Les traités n’autorisent aux Français que des constructions temporaires et en planches pour la pêche et le séchage de la seule morue. Ce dernier argument était très fort; les homarderies étaient de véritables constructions en dur qui exigaient souvent un gardien pendant les périodes hivernales; en outre le homard qu’il n’était pas possible de pêcher et de mettre en conserve jusqu’alors, était-il visé par le traité d’Utrech (1713) et par les traités subséquents (traité de Paris en 1763, traité de Versailles en 1783). Des exégèses et des redéfinitions eurent lieu. Les traités parlaient-ils de pêche en général, ou de poissons en particulier; et en fait, peut-on vraiment dire que l’on “pêche” un homard? Les réclamations individuelles ou collectives par les Syndicats ou par les Chambres de Commerce seront nombreuses. Un accord est conclu en 1890 avec  un statu quo de la situation telle qu’elle existait en 1889, les questions de principe et les droits respectifs étant réservés. Cet accord durera dix ans et plus; en 1904, confirmé en 1908, la France abandonne définitivement ses droits sur le French-Shore. L’affaire sera ainsi classée ...

             Anatole LEMOINE participe à la défense de ses droits en écrivant plusieurs fois au ministre de la Marine (les 9 avril, 27 juillet, 2 et 22 août 1889). Les courriers sont transmis par le commissaire de l’inscription maritime de Saint-Malo, par la Chambre de Commerce de Nantes puis par celle de Saint-Malo. Il est fait état d’une demande de protection, d’intervention, de concours du Ministre. Les armateurs et leurs associés n’engagent de capitaux dans la pêche à Terre-Neuve qu’après avoir demandé et reçu des assurances officielles.Les anglais ont pris possession de bases réservées par les Traités à nos nationaux. Les français réclament un exercice exclusif du droit de pêche dans les baies de la côte de Terre Neuve qui leur sont réservées. La France est autorisée à prendre des mesures de protection. Les anglais n’ont aucun titre à faire valoir et ne peuvent résister légalement. Le Chef de la division française indique qu’il n’était pas en son pouvoir d’empêcher les Anglais de pêcher. Ces derniers nous expulsent de leur côte alors que notre station les laisse faire. L’an dernier, le commandant de la station nous avait fait rendre justice; nous avons tout lieu d’espérer que cela continue cette année sur les promesses faites aux armateurs. Il est demandé au ministre de donner des instructions pour faire respecter les traités et pour rassurer les populations. Le commandant de la station navale argue qu’il n’a pas reçu d’ordre; il interdit même à nos marins une partie du littoral; nos droits sont donc compromis. Ne rien faire permettrait de consacrer les prétentions anglaises. Il est donc urgent de donner des ordres à la station ...

             Le ministre répond à la Chambre de Commerce de Saint-Malo: ...J’ai l’honneur de vous faire observer ... que ces griefs sont fort vagues. Nos pêcheurs ont le droit de n’être pas gênés dans leurs opérations et les instructions du Commandant de la Division Navale lui prescrivent de les garantir contre toute gêne; je ne pourrais lui en donner de complémentaires que si vous me signaliez les cas précis dans lesquels les pêcheurs de Saint Malo n’auraient pas été suffisamment protégés ...Je dois vous dire, au reste, que le Gouvernement ne perd nullement de vue les droits ni les intérêts de nos pêcheurs dans ses rapports avec le gouvernement anglais et qu’il les soutient au contraire avec la plus persévérante énergie ... Recevez ...

             Aussitôt cette réponse, Anatole LEMOINE obtient de ses capitaines un compte-rendu précis de la situation. De Landgreen, capitaine du QUI QU’EN GROGNE, en poste à l’ile Saint-Jean, de Mary , capitaine de l’ELISABETH, de Bourge, capitaine du BELLE BRUNE, en poste à Nouveau-Férolle, il obtient les messages suivants : il parait que notre chef de station et l’anglais ont voulu délimiter les endroits de pêche au homard... un officier m’a dit de retirer les casiers qui sont parmi les anglais... Je lui ai dit que je ne voulais pas de délimitation; que je savais où le homard dormait et que les limites données par le chef d’escadre était mauvaise, que c’était de la vase ... L’on donne à nos nationaux ce que les anglais ne veulent pas; Shearer, l’anglais, prend du homard à volonté et le commandant de la station française nous demande de lever quelques tentes de casiers pour que les anglais s’y mettent; c’est à se demander si ce sont bien des français qui commandent le navire de la station (le Bisson) et  s’ils ne sont pas chargés de défendre les anglais ...(6)

            D - Mais quels étaient donc ces lieux de pêche si convoités et donc si âprement défendus. Le French-Shore est une zone côtière de Terre-Neuve réservée aux Français depuis le traité d’Utrech de 1713. La zone s’étendait initialement dans la partie nord-est entre la cap Bonavista et la pointe Riche. Depuis le traité de Paris de 1783, la zone de pêche se situe dans la partie nord et ouest entre le cap Saint-Jean et le cap Raye.

            Le rapport de fin de campagne 1888 dressé par la division navale française nous donne des précisions intéressantes: vingt bâtiments ont occupé les havres de l’île; les concessionnaires sont: Mathurin Guibert avec 7 navires et 405 employés, Béchet et Yon de Saint Pierre et Miquelon avec 108 personnes, Verry père avec 57 personnes, Thubé- Lourmand avec 72 personnes; Auguste LEMOINE envoie 273 personnes sur DUC-et-ALCYON à Port au Choix, EVANGELINE à Barbacé, HYPPOLYTE à l’île des Sauvages, VAUQUELIN et ANATOLE-et-AMELIE au cap Rouge; Anatole LEMOINE envoie 147 personnes sur QUI-QU’EN-GROGNE à l’île Saint Jean, PUGET à l’anse Barrée, BELLE-BRUNE à l’anse de la Tourelle.

            Les homarderies sont, elles, au nombre de six avec pour gérants: Guibert à Port au Choix, Thubé Lourmand à Brig-Baie, Tajan à l’Anse à la Vierge, Auguste Lemoine à Port au Choix et Anatole Lemoine à l’Anse Barrée et à l’anse à John Marh.

            Les malouins et avec eux les Lemoine ont donc beaucoup utilisé la Côte, même pendant ces périodes où la grande majorité des navires se réservaient uniquement à la pêche aux Bancs. Ils y ont même prolongé leur activité de pêche à la morue par celle du Homard, ce qui a d’ailleurs valu à la France quelques complications diplomatiques.        

             E - Les résultats de pêche pendant cette période sont intéressants à étudier. Au cours de l’année 1889, les résultats de l’armement de Anatole LEMOINE sont les suivants: pour le Banc, les cinq navires envoyés - JOSEPH, RAILLEUSE, FRANCINE, MAGNIFIC et JEUNE CLARA rapportent au total 94 420 kg de morues sèches, 386 900 kg de morues vertes et 11 080 kg d’huile. Les trois navires envoyés au Golfe - BELLE BRUNE, QUI QU’EN GROGNE et ELISABETH - rapportent 41520 kg de morues sèches, 25 940 kg de morues vertes, 2000 kg d’huile, 1908 kg de rogues et 17 344 kg de homards. Enfin et sans doute exceptionnellement, un navire -EMERAUDE - est envoyé en Islande et celui-ci rapporte 115 000 kg de morues vertes, 4 500 kg d’huile et 3 000 kg de rogues. Nous avons donc en tout 135 940 kg de morues sèches et 527 840 kg de morues vertes. L’année précédente en 1888 il y avait eu 96 830 kg de morues sèches et 589 646 kg de morues vertes, 7 000 kg d’issues, 16 870 kg d’huile, 64 012 kg de homards, 2 850 kg de rogues, 2 000 kg de draches, 2 310 kg de saumons et 180 kg de truites. La campagne 1889 était somme toute assez moyenne, tenant compte surtout au fait qu’y participaient neuf navires, au lieu de huit l’année d’avant.

             La qualité d’une campagne dépend aussi beaucoup de la tenue des prix de vente et des cours de la morue au moment du retour. Au retour de la campagne 1888, nous savons que les cours de 100 kg de morue sèche variaient de 45 à 70 frs avec une moyenne à 58 frs; que les cours de 55 kg de morue verte variaient de 18 à 28 frs avec une moyenne à 23 frs. Cette campagne avait rapporté en tout 344 978 frs, soit 49 282 frs par navires en moyenne . Les prix apparemment baissent l’année suivante et nous retrouvons en 1889 le quintal de 55 kg de morue verte à 14,5 Frs à Saint Pierre et à 15,5 frs à Saint Malo au retour . .          

            F - La fixation de la valeur des parts de pêche.

            Les déclarations officielles de retour de pêche étant faites aux douanes de Saint- Servan, en vue notamment de toucher les primes, il y a lieu ensuite de calculer la valeur des parts de pêche, soit au cinquième, soit au tiers, soit encore au last selon en fait les modalités d’enrôlement de l’équipage. Sur la RAILLEUSE, qui a pêché au Grand Banc sous la conduite du capitaine Guernion, la part au cinquième s’est élevée à 139,5 frs, la part au tiers étant de 442,47 frs. Sur le JOSEPH, capitaine Beaudouard, la part au cinquième a été de 122,60 frs, celle au tiers de 388,47 frs. Il y eut 24 parts pour le premier navire et 25 parts sur le second, ce qui voulait dire 22 et 23 hommes d’équipage sur chaque navire, deux parts entières étant réservées pour le capitaine. Le navire EMERAUDE, avec pour capitaine Verry, a pêché en 1889 sur le côte-est d’Islande; c’est  la raison pour laquelle nous avons ici un résultat de pêche (17 906 morues en première pêche, 40 214 en deuxième pêche) calculé et égal à 51,549 last de 2 200 kg , la rémunération du marin étant fixé à l’engagement et étant revu en fin de campagne en fonction des prix de vente obtenus (22 frs en première pêche et 25 frs en deuxième pêche)

            G - Les réglements de la campagne de pêche peuvent ensuite être envoyés aux marins par mandat-poste. Une série de 16 mandats sont adressés le 5 décembre 1889, 25 adressés le 13 décembre 1889 et 13 le 23 décembre. Y figurent le Salaire de retour calculé à partir des lots au tiers ou au cinquième, plus les gratifications en pourcentage. Par contre, y sont soustraites les charges des Invalides (3% des lots sans les gratifications) les avances versées à Saint Pierre ou à l’arrivée, la consommation de tabac (2 à 3 kg par campagne), parfois les frais de halage.

            La campagne de pêche 1889 étant désormais bel et bien terminée, tous ces marins domiciliés en bordure de Rance à Saint Père, Plouër, Pleudihen, mais aussi à Etables, Plouha, Binic ou Pléneuf vont devoir rechercher une nouvelle maison d’embauche, peut-être une nouvelle destinée puisque l’armement d’Anatole LEMOINE en cet hiver 1889 n’a pas pu maintenir ses activités suite au décès de l’employeur.

            En guise de conclusion, nous allons seulement émettre quelques réflexions ayant trait à notre sujet:

     - Tout d’abord, nous pensons que les alliances et d’une façon générale les parentés  sont très importantes dans la vie professionnelle au 19ème siècle; les alliances Moras et Hovius ont été déterminantes pour les Lemoine et pour leurs activités professionnelles.

     - Les origines territoriales nous ont paru également très importantes avec les Lemoine venant de Agon, les Le Gorrec et les Bécot de Paimpol, les Dubois de Laval. Saint-Malo constitue en quelque sorte une terre d’accueil pour toutes ces familles qui conservent malgré tout leur lien originel.

     - Autre constat: il était possible, encore possible, de réussir et de prospérer même sans apport et sans capitaux; les Lemoine , très peu fortunés à l’origine , ont pu avec sans doute beaucoup de travail et de courage constituer une entreprise très florissante et à son apogée dans les années 1870-1890.

     - Le travail de la pêche à Terre-Neuve était rémunérateur; pour donner une échelle de comparaison, on peut affirmer que le prix d’achat d’une goelette neuve (50 000 F) et de son armement (50 000 F) représentait approximativement le produit total de deux bonnes années de pêche; qu’un navire était rentabilisé et amorti après une dizaine d’années de pêche, la durée de vie étant quant à elle de vingt ou trente ans, sauf accidents...

     - Par contre, les entreprises de pêche sont de grande fragilité; ce sont des entreprises à risques: risques de gains importants mais aussi de pertes, ceci malgré les assurances des navires. De nombreuses liquidations amiables ou judiciaires auront lieu consécutivement à de mauvaises périodes de pêche, à la chute du cours de la morue sur les marchés, à un naufrage, ou au décès de l’armateur comme nous avons pu le voir ou encore au moment des grands changements technologiques.

     - A cette époque, la pêche était très importante dans la cité, et dans tout le pays; les marins enrolés étaient nombreux; les familles de marins étaient également nombreuses, la sous-traitance importante avec la salaison, le calfatage, les voileries et les tonnelleries , les forges , les corderies et les poulieries etc...; à titre d’exemple, il y avait en 1894 à Saint Malo 116 navires en activité avec peut-être 1500 à 2000 marins à bord; nous supposons avec les familles un nombre de 7000 à 10 000 personnes; avec les entreprises sous-traitantes un nombre de 15 000 à 20 000 personnes. Ce grand nombre de personnes est à rapprocher de celui de la population à l’époque de Saint-Malo (13 à 14 000) et surtout de celui de ce que nous appellerions aujourd’hui le bassin d’emploi de Saint Malo (80 à 100 000 ?).

     - Terre-Neuve a été véritablement une terre d’enjeux économiques et de conflits importants; on y trouve également des avis très partagés et controversés sur la condition du marin et surtout des mousses, sur l’importance du tabac et de l’alcool, sur les gains des marins, sur l’état des navires, sur le rôle de la diplomatie et du gouvernement français,et même sur celui des Oeuvres de Mer...

     - L’agonie de la pêche hauturière était irrémédiable avec les effets conjugués de la perte des lieux de pêche, l’appauvrissement des fonds marins, la suppression des primes, l’augmentation des coûts de production ( charges, carburant ...), le désintérêt aussi, semble-t-il des pouvoirs publics...

     En réalité, l’histoire de la pêche à Terre Neuve n’a pas lieu d’être triste même si elle nous inspire parfois une certaine nostalgie. L’histoire de la Grande Pêche a été celle d’une formidable aventure humaine, unique en son genre, avec ses centaines d’hommes partant tous les ans à plus de 4 000 Km de Saint Malo et qui pendant les quelque cinquante ans de leur vie professionnelle ne verront plus leur ville d’attache qu’en hiver ... Je suis très heureux et fier que les Lemoine aient pu participer à ce beau métier en mettant en oeuvre une entreprise d’armement très remarquable de l’activité de pêche développée à  partir de Saint Malo tout au long du 19ème siècle.

                                                            Y.D.F. – reproduction interdite -

Texte paru dans l’annuaire 1999 de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Saint-Malo     

NOTES:

1°) voir Navires de Saint-Malo 17ème-18ème siècle par Roger  MARTIN DESGREVES, édition PARCHEMIN -1992 .

2°) voir Histoire de la pêche française  de la morue dans l’Amérique Septentionale par Charles de la MORANDIERE - 1962

3°) voir le livre de Jules HAIZE sur l’Histoire de Saint Servan en 1789-1800

4°) voir le livre de François TULOUP sur l’Histoire de Saint Malo

5°) on a prétendu que les morues étaient elles-mêmes très friandes de bulots et que prendre ces mollusques comme appâts était une manière de tarir la source de la pêche.

6°) concernant la guerre de la boëtte, ainsi que la guerre des homarderies, voir le livre de Charles de la Morandière; voir également  l’ouvrage de Léopold Soublin “Cent Ans de Pêche à Terre-Neuve “ édition Veyrier - 1991 .