La noblesse d’Empire (1808-1815)

La noblesse d’Empire (1808-1815)

 

            A l’époque de Napoléon, une nouvelle noblesse, une chevalerie, un corps d’élite stable, a été réinventée, vouée à soutenir la 4ème dynastie française, après celles des Capétiens en ligne directe, des Valois et des Bourbons.

            L’attribution des titres eut lieu en 1804 pour les princes impériaux ou souverains, en 1806 pour les ducs, en 1808 jusqu’en 1814 pour les comtes, barons et chevaliers, ceci au moyen de Lettres Patentes ou à défaut par décrets impériaux ; la liste est faite à partir des Archives du Conseil du Sceau ; pendant les Cent Jours, il n’y eut pas de Lettres Patentes car le Sceau avait été détruit.

            Un décret du 1er mars 1808 définit et réglemente cette nouvelle institution.

La Légion d’Honneur créée le 19 mai 1802 et attribuée pour la 1ère fois le 14 juillet 1804, est la 1ère étape vers l’établissement de la noblesse d’Empire.

En tout, il y eut 3263 anoblissements : 388 titres de comtes, 1090 titres de barons et 1600 titres de chevaliers ; 67,9% sont des militaires dont certains à la retraite ; les généraux de division deviennent essentiellement comtes et barons ; 387 colonels, dont le colonel Etienne Duboys Fresney (1758-1864), obtiennent des lettres patentes ; la hiérarchie des titres épouse celle des grades ; une forte proportion vient de la Garde Impériale ; le Génie est mieux servi que l’Artillerie ; la Marine occupe une place réduite.

            A côté de la noblesse d’épée, il y a la noblesse de fonction ; les conseillers d’Etat, dont Jacques Defermon (1752–1831), les archevêques, les maîtres des requêtes, les hauts magistrats deviennent comtes et barons ; presque tous les préfets reçoivent des lettres patentes, également les maires des grandes villes, les ministres, les ambassadeurs.

            Les titres de l’ancienne aristocratie étaient abolis ; toutefois les rangs de l’élite impériale étaient ouverts aux nobles déchus ; certains se rallièrent, d’autres restaient à l’écart, fidèles à la monarchie traditionnelle ; la cause du ralliement était soit la gêne matérielle, soit l’admiration pour Napoléon, soit la volonté d’avoir une place, soit encore la volonté de servir … pas seulement dans une antichambre … Certains rejoindront Napoléon par calcul …

Pour qu’un titre soit héréditaire, il fallait justifier au moins d’un revenu minimum annuel et constituer un majorat

            Les revenus devaient s’élever à 200 000 francs pour un duc, 30 000 francs pour un comte, 15 000 francs pour un baron, 3 000 francs pour un chevalier

            Un majorat était un capital foncier inaliénable qui échappait au partage successoral mais était transmis solidairement avec le titre ; le majorat n’était pas obligatoire pour rendre le titre de chevalier héréditaire.

            Article 22 du décret du 3 mars 1810 : lorsqu’une dotation aura été accordée à un chevalier de l’Empire, membre en même temps de la Légion d’Honneur et qu’il ne sera revêtu d’aucun autre titre impérial, ledit titre de chevalier ne sera transmissible à l’aîné de ses descendants qui ne seraient pas membres de la Légion d’Honneur, jusqu’à y compris la 3ème génération, d’autant qu’ils en auront obtenu la confirmation.

 

            A la Restauration, la Charte octroyée par Louis XVIII prévoyait dans son article 71, « la noblesse ancienne reprend ses titres ; la nouvelle conserve les siens. Le Roi fait des nobles à volonté, mais il ne leur accorde que des rangs et des honneurs, sans aucune exemption des charges et des devoirs de la société. »

            Donc aucun rétablissement des droits féodaux et une coexistence de la vieille noblesse avec celle napoléonienne.

            Par l’ordonnance du 8 octobre 1814, la Légion d’Honneur est maintenue : « lorsque l’aïeul, le fils et le petit-fils auront été successivement membres de la Légion d’Honneur et auront obtenu des Lettres Patentes, le petit-fils sera noble de droit et transmettra sa noblesse à toute sa descendance. »

 

(voir le livre « Napoléon et la noblesse d’Empire » par Jean Tulard chez Taillandier éditeur)